Everything is going to change

La brune avait passé toute la journée dans les plantations en arrachant et ramassant les récoltes qui devaient être empilées dans la réserve de nourriture. Les ressources s’amincissent de jour en jour, surtout depuis que les filles étaient arrivées. L'après-midi avait été longue et ardente mais elle était satisfaite d'avoir pu aider les jeunes hommes, même si certains gardaient encore une part de méfiance envers elle. Newt l'avait supervisée, tandis que Minho la surveillait toujours d'un œil. Quant à Thomas, elle ne l'avait pas vu de la matinée. Peut-être était-ce mieux ainsi, prendre des distances. Chanel avait terminé son repas et rejoignit alors Alessandro qui l'attendait dehors. Il lui avait promis de lui donner des réponses sur les détails du Labyrinthe et du Bloc. Les autres n'avaient pas voulu lui en dire plus, elle avait donc sauté sur l'occasion dès que le vampire lui en avait donné l'avantage. Elle s'avança alors vers lui en lui adressant un sourire. « Bonsoir. Je suppose que tu m'attendais. » Il se retourna et la scruta de haut en bas en affichant un petit rictus. Il était évident qu'il était sûr de la voir débarquer avec sa curiosité légendaire. Aless passait pour un mec sympathique et amical. On pouvait dire que leur rencontre avait été bousculée au sens propre du terme, mais il s'était montré compatissant la veille au soir lors de leur discussion tardive. Attentif et compréhensif envers la jeune femme, il l'invita à venir se promener dans les recoins du Bloc. « Revoilà la curieuse, alors maintenant dis-moi tout. » Ils traversèrent ensemble le terrain verdâtre, en croisant le reste des blocards qui allèrent préparer les hamacs dans la petite cabane en bois.

Alessandro lui avoua avant qu'il avait quelque chose à lui dévoiler. Chanel avait déjà remarqué des choses étranges depuis son arrivée mais elle y avait fait abstraction. Elle ne croyait pas à l’irrationnel, mais comment nier ce qu'elle avait sous les yeux. Un être qui ne s'affaiblit pas, qui ne se blesse pas, dont l'apparence change d'une manière inexplicable. Toutes ces marques étonnantes sur la gorge de certaines personnes. Elle en avait eu la preuve avec un des blocards proche d'elle plus tôt dans la journée, qui avait sur le visage des veines dessinées juste sous ses yeux, avec un comportement bizarre. Il s'était éloigné brusquement, entrain de tenter de résister à quelque chose. Du sang. Un vampire ! Non, cela ne pouvait pas être possible, c'était ridicule. Elle se rappelait alors de ce que lui avait dit Newt, qu'Aless était un vampire.

Chanel s'arrêta alors et se tourna lentement vers lui, le regardant droit dans les yeux. « Qui es-tu ? » Elle le savait, mais elle n'osait pas se l'avouer, elle ne voulait pas y croire. Toutes ces certitudes et sa perception du monde étaient sur le point de changer. Elle recula d'un pas, et frissonna en attendant la confirmation. « J'aurais pas dû venir. » Elle se mit à courir en direction des bois mais il la rattrapa en moins d'une fraction de secondes. « Comment t'as fait ça ?! Laisses-moi partir. » Elle déguerpit à nouveau et se stoppa quelques mètres plus loin en s'appuyant contre le tronc d'un arbre. Elle tournait en rond en passant nerveusement une main dans sa chevelure. Il venait encore d'apparaître sans prévenir et elle sursauta. Il lui barrait le chemin, et la jeune humaine sanglotante resta dos à lui, collée contre l'écorce de l'arbre. Elle pouvait presque sentir son souffle juste derrière son buste. La brune ne savait pas comment réagir, elle avait peur mais elle avait également ce sentiment de déjà vu. Maintenant qu'elle était au courant, sa vie était en danger pour des raisons plus ou moins évidentes. Elle pouvait le haïr mais elle n'avait pas d'autres choix que de lui faire confiance. Si il aurait voulu planter ses crocs dans sa chair il l'aurait déjà fait.

Attendant à l'extérieur, le jeune homme entendait les pas de la brune arrivait vers lui, venant à peine de terminer son repas. Elle s'approchait dans son dos mais il ne se retourna pas, pas pour l'instant, jusqu'à ce que la voix fluide de la jeune femme retentisse. « Bonsoir. Je suppose que tu m'attendais. » Il se retourna enfin et la gratifia d'un demi-sourire en la jaugeant rapidement. Intérieurement le manipulateur en lui souriait jusqu'aux oreilles, tout se passait exactement comme prévu. « Revoilà la curieuse, alors maintenant dis-moi tout. » Chanel voulait des réponses et elle en aurait, mais pas forcément de la manière qu'elle l'imaginait.

Traversant le Bloc à pas lents ils croisèrent plusieurs blocards marchant droit vers leur hamac. Ah si l'appel du sang était une chose, il ne fallait jamais sous-estimer l'appel du sommeil. Alessandro laissa le silence planer quelques instants, le temps de s'éloigner des oreilles indiscrètes, et surtout des oreilles trop fines des vampires. Lorsqu'ils furent suffisamment loin le jeune homme pu commencer, et il savait très bien par quoi commencer. Lui donner de vraies réponses, sur ce qu'elle niait depuis le début malgré les preuves plus que nombreuses et concrètes. Il lui avoua alors avoir quelque chose d'important à lui confier, et elle comprit d'elle-même. Soudain nier fut inutile, mais l'irréfutable scientifique en elle n'y croyait toujours pas.

Chanel s'arrêta alors et planta son regard dans le sien. « Qui es-tu ? » demanda-t-elle en reculant, frissonnante. Elle ne cherchait même pas à contenir son angoisse et le vampire entendait le cœur de la jeune femme battre à tout rompre sous l'effet de la peur. Délicieux. « J'aurais pas dû venir. » termina-t-elle avant de faire volte-face et de s'enfuir vers les bois, mais sa course fut de courte durée. En une demi-seconde Alessandro l'avait rattrapée, ce qui ne fit qu'attiser la crainte de la brune « Comment t'as fait ça ?! Laisses-moi partir. » Et elle fila à nouveau. Cette fois-ci le vampire lui accorda plus de répit, levant les yeux au ciel il l'observa courir comme une furie. Si lente humaine cherchant à fuir, alors que cela lui était impossible.

Elle s'arrêta, reprenant son petit souffle épuisé d'humaine, alors il la rattrapa. La jeune femme sursauta, et, sanglotante elle lui tourna le dos en se collant à un tronc d'arbre. Le vampire leva les yeux au ciel et soupira avant de l'empoigner par les épaules pour la forcer à lui faire face. « Hé du calme Chanel, calmes-toi. » Il planta son regard dans le sien. « Je ne vais pas te faire du mal, tu le sais très bien, je ne suis pas là pour te blesser, d'accord ? » Il l'observa un court instant puis reprit. « Et je t'en prie ne t'enfuis pas à nouveau car on peut faire ça toute la nuit, ça ne nous mènera à rien. Si tu veux des réponses tu les auras, mais tu dois les accepter, celle-là avec... » Relâchant la pression sur les épaules de la jeune femme le vampire emprunta un masque solennel le temps de dire les mots fatidiques. « Je suis un vampire. »

Les deux blocards étaient seuls en plein milieu des bois dans la nuit noire. La pression montait en flèche. La jeune femme avait du mal à reprendre son souffle et son pouls ne faisait que s'accélérer sous la peur et l’incompréhension. Elle aurait voulu s'enfuir à toute vitesse mais elle savait que cela ne servirait à rien. Cette créature était bien trop rapide et puissante. Des frissons lui parcouraient le corps tout entier, lui donnant une sensation déplaisante et terrifiante. Sanglotante, elle lui tournait toujours le dos, collée au tronc d'arbre. Les larmes lui montaient au yeux, tandis qu'Alessandro l'empoigna soudainement par les épaules pour la forcer à lui faire face. Contrainte à devoir se retourner, elle mit plusieurs secondes avant d'ouvrir les yeux et regarder le visage du vampire. « Hé du calme Chanel, calmes-toi. » Cela ne fît qu'accentuer son affolement. Elle voulait des réponses, elle en a eu.

La brune ne pouvait plus nier ce qu'elle avait sous les yeux, un être vampirique doté de capacités surhumaines. Sûrement pouvait-il manger de l'ail, et le soleil ne semblait pas être un inconvénient. Comment était-ce possible ? Ce qui était sûr, c'est qu'à tout moment il pouvait se jeter sur elle afin de la vider de son sang, en guise de plateau repas. Alessandro plongea ensuite son regard dans le sien, essayant de calmer le jeu, afin de l'apaiser et de la rassurer. « Je ne vais pas te faire du mal, tu le sais très bien, je ne suis pas là pour te blesser, d'accord ? » Chanel hocha la tête et essuya brièvement ses yeux qui étaient devenus humides. Elle referma ses paupières un court instant afin de prendre une respiration moins nerveuse et souffla un grand coup. Elle allait surmonter cela, il le fallait. « Et je t'en prie ne t'enfuis pas à nouveau car on peut faire ça toute la nuit, ça ne nous mènera à rien. Si tu veux des réponses tu les auras, mais tu dois les accepter, celle-là avec... » La jeune femme voulait tellement lui faire confiance. Voyant qu'elle s'était adoucie, il relâcha doucement la pression sur ses épaules et recula d'un pas pour lui laisser un minimum d'espace.

D'une voix pas très assurée et hésitante, elle s'avança légèrement en serrant son pendentif à son cou d'une main. « Je... Je te crois. » Il se tenait là, juste devant elle. Il paraissait si humain, pourtant il ne l'était pas. « Je suis un vampire. » Il venait enfin de prononcer ces mots, une affirmation qu'elle avait besoin d'entendre. Mais après tout, peut-être avait-il des bons côtés. Elle refusait de croire qu'il était un monstre sanguinaire dépourvu de sentiments et d'intérêts. Peu importe si il était différent, peu importe si il pouvait avoir plusieurs siècles d'existence, malgré tout elle s'intéressait toujours à lui. Comme un aimant, une obsession d'en savoir encore davantage. Voulant une émotion qui la consumerait, elle voulait de la passion et de l’aventure, et même un peu de danger. Il était temps de faire face à la réalité. Mais si les autres blocards n'étaient pas tous des vampires, ils étaient quoi ? Des tortues ninjas ?

Chanel se décida à s'approcher d'Alessandro et observa les traits de son visage. Elle avança doucement ses mains afin de les poser sur la peau du vampire. Des petites veines se dessinèrent sous ses yeux et elle les effleura avec ses doigts fins et délicats. La brune le contemplait, comme en admiration devant ce phénomène surnaturel. Il était certain qu'il avait toujours une part d'humanité en lui, elle en était presque sûre. « Je n'ai pas peur de toi. » Sa crainte venait de se changer en admiration, gardant toujours son visage près du sien. Pourtant une partie d'elle aimerait pouvoir oublier, oublier de l’avoir rencontré, qu'elle venait de découvrir ce qu'il était, et tout ce qu’il s’était passé. La jeune humaine ne souhaitait plus avoir ces sentiments. Mais avec tout ce qui était arrivé, elle ne pouvait pas perdre ce qu'elle ressentait envers lui. De la curiosité et de l'empathie. Il y avait du changement dans l'air.

Alessandro sentit un poids s'envolait dans l'air, face à l'évidence Chanel avait nié. Mais à présent que les mots étaient dits, ils étaient gravés dans son esprit telle une chanson lancinante, à présent elle ne pouvait plus nier la dure évidence. Le surnaturel existait, les vampires avec. La jeune femme referma une main sur son collier comme si ce simple bijou avait le force d'un talisman puissant et protecteur, peu rassurée elle avança hésitante : « Je... Je te crois. » Il avait sa confiance...et pourtant il sentait encore de la méfiance en elle. Elle restait sur ses gardes, hésitante et prudente.

Alors elle s'approcha de lui, posant une main sur le visage du vampire, effleurant des doigts les petites veines qui se dessinèrent sous les yeux du brun à son contact. La brunette resta ainsi quelques instants, comme soufflée par cette vision. Alessandro restait focaliser sur un seul élément, son coeur. Le pouls de la jeune femme ralentit progressivement, la panique cédait peu à peu sa place à une sensation bien plus rassurante. Chanel baissait sa garde. « Je n'ai pas peur de toi. » dit-elle, admirative du spectacle qu'elle observait.

Il saisit délicatement la main de la jeune femme et la pressa doucement, « Tu n'as pas à avoir peur de moi, je ne te ferais aucun mal, jamais. » dit-il d'un ton rassurant qui sonnait comme une promesse de protection. Plantant son regard dans les prunelles de la jeune femme il esquissa un demi-sourire. « Tu n'as pas à avoir peur, d'aucun d'entre nous. »

Aux mots nous la jeune femme haussa un sourcil inquisiteur, mais avant qu'elle ne puisse poser la moindre question le vampire contrecarra la curiosité de la jeune femme en achevant sa phrase : « Vampires, sorciers et même des loup-garous. Tout cela existe, c'est réel. Mais nous ne sommes pas un danger...le danger ne vient pas de nous. » A ces mots le vampire savait qu'il venait de mettre l'esprit de la jeune femme en alerte rouge. Chanel n'allait pas s'arrêter avec si peu d'information, si peu de réponses. Non elle voulait plus, elle voulait toujours plus. Malgré le danger annonçait elle n'eut pas à dire un mot qu'Alessandro savait : elle voulait voir le fameux danger.

Il se détourna, jetant un regard vers les imposants murs qui les entourait. Puis il se retourna vers Chanel et lança d'un ton plus entrain « Je peux te le montrer si tu veux » Se voulant rassurant il tendit une main vers elle, offrant de l'accompagner « Tu verras ça vaut le détour, je pourrais bien t'expliquer ça en un mot mais c'est beaucoup plus spectaculaire en vrai. »

C'était difficile de savoir en qui on pouvait avoir confiance, sur qui on pouvait compter. Perdue et sans défense, elle n'avait pas d'autres choix que de croire chaque mot qu'avait prononcé le jeune homme. Entourés par les arbres de la forêt, il était trop tard, il l'avait trouvée. Cette fois elle était seule, et ce n'était pas Thomas ni une autre personne qui allait la défendre. Où était-il alors que tout s'effondrait ? La jeune femme n'allait plus agir ou penser de la même manière car elle connaissait enfin la vérité. Chanel savait désormais ce qu'il l'attendait dehors. Premièrement, ils avaient besoin de discuter. Alessandro lui sourit poliment, elle commençait à se demander pourquoi elle était venue. Où avait-elle bien pu faire une erreur ? Avec un sentiment d'amertume, elle allait rester éveillée sans doute toute la nuit à ses côtés, afin d'en apprendre davantage. La jeune humaine contemplait toujours le visage du vampire tout en se sentant de plus en plus rassurée. Cela était bien réel, et elle se fît petit à petit à l'idée qu'il puisse être une créature surnaturelle, dotée d'une force incroyable.
       
Alessandro saisit alors délicatement la main de la jeune femme et la pressa doucement, en brisant le silence pesant. « Tu n'as pas à avoir peur de moi, je ne te ferais aucun mal, jamais. » Elle le crût sur parole et elle décrocha enfin un léger sourire. Quand le monde nous accablait de lourds tourments, les secrets devaient être dévoilés. « Tu n'as pas à avoir peur, d'aucun d'entre nous. » Son sourire s'effaça presque automatiquement. Nous ? Apparemment ils semblaient nombreux à être comme lui. Chanel ouvrit la bouche afin de poser une question mais le brun continua sa phrase. « Vampires, sorciers et même des loup-garous. Tout cela existe, c'est réel. Mais nous ne sommes pas un danger. Le danger ne vient pas de nous. » Instinctivement, elle fît un pas en arrière, comme sur le point de s'effondrer sur le sol sous l'effet de la révélation plutôt surprenante. Le souffle coupé, c'était comme si on venait de lui donner un coup violent dans l'abdomen, avec l'impression que sa tête était sur le point d'exploser. Mais le plus étonnant, c'était qu'elle soit intriguée par le fait qu'il évoquait un danger. De quoi voulait-il parler ? Il se détourna ensuite, jetant un regard vers les imposants murs qui les entourait. Le Labyrinthe. Voilà de quoi il s'agissait. « Je peux te le montrer si tu veux. » Il se passa un long moment avant qu'elle ne décide à répliquer. « Emmènes-moi jusqu'à ces murs. » Elle n'hésita pas pour donner une réponse spontanée et immédiate. C'était le premier blocard depuis son arrivée, qui voulait enfin lui avouer ce qu'il se cachait derrière ces immenses murs. On lui avait expliqué brièvement que des monstres rôdaient à l'intérieur, mais sans entrer dans les détails. C'était l'occasion parfaite pour découvrir cet endroit.

Le vampire tendit une main vers elle, se proposant de l'accompagner et de faire le guide, afin de s'approcher de l'entrée du Labyrinthe qui était encore ouverte. « Tu verras ça vaut le détour, je pourrais bien t'expliquer ça en un mot mais c'est beaucoup plus spectaculaire en vrai. » Chanel s'avança lentement vers lui et prit sa main, posant sa paume contre la sienne. Il la tira doucement et ils commencèrent à marcher en direction des portes. La nuit était noire et elle ne voyait presque pas où elle mettait les pieds. Elle continuait d'avancer en tenait toujours la main d'Aless qui affichait un air assuré et sûr de lui. « Ne me cache rien, j'ai besoin de tout savoir. » Assez de mensonges comme cela. Même si la vérité était dure à encaisser, elle ne pouvait plus jouer l’innocente. En entendant une chouette hululer, elle pressa davantage la main du vampire, se retournant de temps à autre derrière eux, de peur que quelqu'un les suive ou que quelque chose débarque de nulle part sans prévenir.

Gourmandise, avarice, orgueil, envie, colère, luxure et paresse. Les sept péchés capitaux connaît tous les coupables et aucun innocent, mais si tous sont pêcheurs, certains le sont tout simplement plus que d'autres. Pour certains la colère n'est pas un synonyme de pêché, mais plutôt de pouvoir. Car en premier lieu colère rime avec vengeance. Et la vengeance ne serait jamais aussi animée sans l'envie qui nous prend de l'exécuter. Ainsi tous sont pêcheurs, d'autres plus que la normal. Et après tant de décennies sur cette terre, Alessandro était bien loin de l'absolution.

L'humaine semblait si fragile, son cou gracile se percerait si facilement sous les crocs du vampire, et ses os si délicats si simple à briser. Humain était synonyme de faiblesse, et si Alessandro aurait voulu voir mourir la jeune femme il l'aurait déjà tué. Il lui aurait brisé la nuque d'un coup sec, ou l'aurait drainé jusqu'à que son cœur lâche... Le fait était que, il ne la voulait pas morte. Elle n'avait pas besoin de le craindre. Chanel commençait à peine à réaliser ça, offrant peu à peu plus de terrain concernant sa confiance. Et bientôt la jeune femme se laissa faire, emportée par sa curiosité.

« Emmènes-moi jusqu'à ces murs. » déclara-t-elle d'un ton assuré après une hésitation qui sembla durer une décennie entière. La jeune femme s'approcha et posa sa main dans celle tendu par Alessandro. Le brun esquissa alors un sourire puis escorta la brunette vers le Labyrinthe. Alessandro réalisa alors que Chanel se laissait totalement guider par lui, elle ne lui avait même pas lâché la main. Elle lui offrait sa confiance totale et dévouée. « Ne me cache rien, j'ai besoin de tout savoir. » ajouta la jeune femme en pressant un peu plus fort la main du jeune homme. « Je n'ai rien à te cacher, promis. » la rassura-t-il d'une voix douce et protectrice.

La nuit s'étalait doucement sur le Bloc et peu à peu qu'ils s'approchaient des murs l'obscurité semblait plus profonde et inquiétante. Une fois devant les portes le brun s'arrêta et lâcha la main de la jeune femme. Sans quitter des yeux les imposants murs du Labyrinthe le jeune homme s'adressa à la brunette. « Là est le vrai danger, ces murs, ce Labyrinthe. Nous sommes pris au piège ici, coupés de la civilisation. » Il ferma les poings avec rage, ses ongles rentraient dans sa paume jusqu'à la transpercer. Il inspira longuement, faisant le vide dans esprit torturé. Il devait oublier sa colère, faire taire cette rage.

Il tourna son regard vers la jeune femme, le regard luisant de colère. « Personne ne vous préviens que c'est comme ça, qu'il n'existe pas d'issue favorable pour nous. Ils vous laissent dans l'ignorance en pensant vous protéger mais c'est pire... » Le brun se mordit la lèvre, laissant ses idées en suspens, puis reprit « Vous n'avez aucune idée d'où vous êtes vraiment, ni de comment en sortir. »

Le vampire s'approcha de la jeune femme, son visage s'adoucit aussitôt, il semblait finalement apaisé pour quelques instants. « Mais tu vas nous sortir de là pas vrai, tu es notre sauveuse. Les autres ont peur de ça, ils t'imaginent comme une menace, mais tu n'es pas un danger, pas pour nous » dit-il en posant une main sur la joue de la jeune femme. « Quand je t'ai vu pour la première fois je l'ai tout de suite su, j'ai senti ce désir... »

Un bruit strident s'éleva derrière eux, dans un son de rouages les portes se mirent à glisser l'une vers l'autre dans une lenteur qui surprendrait toujours le jeune homme. Il se retira, sa main retomba contre sa cuisse tandis qu'il reculait d'un pas. Le regard baissé vers le sol le brun patientait, l'impatience de la jeune femme atteignait son paroxysme. Et lui intérieurement jubilait, bientôt un poids énorme allait être révélé, et ce poids ne l'encombrerait plus jamais. Il allait enfin redevenir un homme entier. « Ce désir brûlant et irrépressible de te détruire » Le brun releva son regard, un sourire carnassier plaqué sur ses lèvres, « Tu n'aurais jamais dû venir ici, tu as commis une grave erreur. Une erreur fatale même. »

L'incompréhension se lisait sur le visage de sa victime, elle n'eut le temps de crier, ni de fuir. Le jeune homme fondit sur elle en une fraction de secondes. L'humaine retomba quelques mètres plus loin, son corps retombant lourdement sur le bitume, de l'autre côté des portes.

Alessandro l'emmena jusqu'aux murs imposants du Labyrinthe. Ils s’arrêtèrent devant les portes qui paraissaient encore plus effrayantes dans l'obscurité de la nuit noire. Elle avait encore tant de questions à lui poser, mais il avait promis de lui expliquer et de lui montrer chaque détail important concernant ce lieu. Qu'est-ce qu'il pouvait bien y avoir derrière ces portes au point que les jeunes hommes ne voulaient pas y aller ? Le vampire observait les gigantesques murs tandis qu'il s'adressait à la jeune humaine. « Là est le vrai danger, ces murs, ce Labyrinthe. Nous sommes pris au piège ici, coupés de la civilisation. » Dis comme cela, ça paraissait presque insensé, mais il essayait de lui faire comprendre qu'il n'y avait pas d'issue possible. « Personne ne vous préviens que c'est comme ça, qu'il n'existe pas d'issue favorable pour nous. Ils vous laissent dans l'ignorance en pensant vous protéger mais c'est pire... Vous n'avez aucune idée d'où vous êtes vraiment, ni de comment en sortir. » Manipulés comme des oiseaux en cage, les blocards étaient piégés ici sans pouvoir en sortir. Aless se retourna ensuite lentement vers elle, d'un air calme et protecteur. « Mais tu vas nous sortir de là pas vrai, tu es notre sauveuse. Les autres ont peur de ça, ils t'imaginent comme une menace, mais tu n'es pas un danger, pas pour nous » On aurait presque aperçu une lueur d'espoir dans les prunelles du jeune homme, qui posa doucement sa main sur la joue de Chanel. Elle était comme subjuguée devant cet être vampirique, ses yeux alors plongés dans les siens, tout cela dans une confiance totale. « Quand je t'ai vu pour la première fois je l'ai tout de suite su, j'ai senti ce désir... » Leurs visages se rapprochèrent dangereusement l'un de l'autre, quand d'un coup un bruit strident ce fît entendre. La jeune femme sursauta et se retourna pour observer les portes derrière eux qui commencèrent à se refermer lentement grâce à un mécanisme. « Qu'est-ce que... » Elle resta bouche-bée devant ce spectacle étonnant et impressionnant. Comment des murs aussi énormes pouvaient-ils se déplacer ainsi ? Aless recula d'un pas et afficha un grand sourire. « Ce désir brûlant et irrépressible de te détruire. Tu n'aurais jamais dû venir ici, tu as commis une grave erreur. Une erreur fatale même. » Elle ne comprenait plus rien, ils étaient si proches il y a quelques secondes et là il semblait la détester.

Avant même de pouvoir répliquer, le jeune homme bondit sur elle et la poussa brusquement. L'humaine retomba quelques mètres plus loin, son corps retombant lourdement sur le sol, de l'autre côté des portes. En relevant la tête, les portes du Labyrinthe étaient presque refermées entièrement. « Non, non, non ! » Le vampire affichait un large sourire derrière la légère fente encore visible, et Chanel se releva rapidement, courant vers lui. Mais en quelques secondes il était déjà trop tard. Les portes venaient de se fermer dans un bruit sourd et retentissait. « Alessandro, qu'est-ce que tu fais ? Sors-moi de là ! » Elle tambourinait les parois du murs en criant. Comment avait-il oser ? Comment avait-elle pu faire confiance à un vampire ? Elle est idiote, idiote ! La jeune femme hurlait de rage et frappait le mur avec ses poings jusqu'à ce qu'ils soient en sang. Désemparée et outrée,  elle se rendit enfin compte qu'elle était fichue. Il était inutile d'appeler à l'aide. Il l'avait trahie, manipulée, blessée. Elle allait devoir passer la nuit entière dans ce Labyrinthe.

Chanel se laissa glisser le long de la paroi, retombant sur le sol. Des chaudes larmes coulèrent sur ses joues. Elle allait rester seule et sans défense dans un endroit inconnu. En cet instant même elle pensait à Thomas... Elle était perdue sans lui. Le temps s'évadait, tout s'était volatilisé en seulement quelques secondes. Être arrivée si loin mais en fin de compte cela n'avait plus d'importance, elle avait tout perdu. Elle allait devoir se battre aujourd'hui, une dernière bataille. C'est juste une autre guerre, une autre personne déchirée qui avait besoin d'un héros pour la sauver maintenant.

Un rugissement soudain la fît sortir de ses pensées. Un Griffeur arrivait... Chanel se releva rapidement et se mit à courir à travers les allées et les murs cachés par le lierre. Le bruit se rapprochait et elle n'avait aucune idée d'où elle allait. La jeune femme se dirigea le cœur battant à tout rompre à travers les nombreux chemins. Essoufflée, elle s'arrêta dans l'allée suivante. Un cul-de-sac... C'est pas vrai ! Les crissements métalliques se rapprochèrent de plus en plus. Paniquée, elle fila se cacher derrière le lierre épais qui ornait les murs grisâtres. En retenant son souffle, elle apercevait une créature similaire à une limace géante, mais rien ne distinguait la tête de la queue. Des pointes métalliques émergeaient de sa chair telles de longues aiguilles menaçantes dotées de pinces ou de cisailles. Aussi hideuse que dangereuse, la créature se déplaçait en effectuant des roulades. Chanel se retenait de crier, de peur qu'elle ne se fasse remarquer. Le Griffeur passa juste à côté en effleurant ses jambes. Elle ferma les yeux un instant, et le monstre mécanique commença à s'éloigner. La jeune femme soupira, relâchant alors la pression, rassurée de ne pas être remarquée.

Ses cris furent happés par l'obscurité, comme si le Labyrinthe aspirait peu à peu le souffle de la jeune femme, comme s'il l'a tuait à petit feu. Sauf que cela serait tout sauf lent et douloureus. Petit à petit la douce mélodie de la vengeance s'éteignait, au fur et à mesure que sa victime s'épuisait. Les paupières closes il caressa d'une main la pierre qui le séparait de sa frêle ennemie. Ses ongles griffèrent doucement le mur, tandis qu'à quelques mètres, la jeune femme tambourinait contre ce même béton jusqu'à avoir les poings en sang. On se souvient du sang et des larmes versées au cours d'une vengeance, mais pour les malfaiteurs, la vengeance a un étrange goût de paix.

Sans remords, ni regrets. Il avait fait ce qu'il devait faire, il n'avait aucun doute là dessus. Son corps s'était vu éprit de ce désir de vengeance dès qu'il l'avait vu, et son esprit fut torturé des jours durant. Le jeune homme ne se souvenait ni d'elle, ni de lui, pourtant un seul regard vers la jeune femme avait su réveiller la bête sommeillant en lui. Tapie dans l'ombre depuis des années, voir des décennies, rien ni personne n'aurait pu la stopper.

Un cri s'éleva de l'autre côté du mur, plus un rugissement qu'un cri. Celui d'un Griffeur. Alessandro avait sustenté la bête, car même si la jeune femme survivait à cette nuit, elle ne serait jamais plus la douce, et un peu trop naïve, humaine qui était arrivée quelques jours auparavant. Le vampire n'avait pas besoin de savoir qui elle était, d'une façon ou d'une autre ils étaient connectés avant le Bloc. Ce besoin viscéral de vengeance s'était réveillé brutalement, le submergeant à l'image d'une vague qui  submerge le sable. Mais toute eau qui dort est déjà présente dès le début. Chanel était, de loin ou de près, liée au passé du jeune homme. Et visiblement ce n'était pas dans un passé heureux. Alors le vampire savourait à présent les cris de la jeune femme, sa souffrance était un met exquis qui l'enivrait. Les cris de sa victime s'étouffèrent dans un écho lointain mêlant hurlements grossiers et l'éternel cliquetis qu'émettait les Griffeurs. Faisant volte-face, le jeune homme laissa Chanel à son triste sort. À l'ouverture des portes les blocards et les Créateurs trouveraient la jeune femme, ou ce qu'il en reste, et à ce moment là... sa vengeance serait complète.

Allongé par terre, Alessandro se laissait bercer par l'obscurité, s'accrochant aux derniers souvenirs de sa vengeance. Chaque larmes et gouttes de sang que verseraient la jeune femme serait une réussite, sa réussite, sa vengeance. Oublié dans ses méditations il perdit la notion du temps. Peu avant l'aube le jeune homme se releva. Dans moins d'une heure les portes allaient s'ouvrir, et personne ne devait suspecter le brun d'être à l'origine du tragique contretemps qu'avait eu Chanel.

Avec une certaine excitation il s'imaginait déjà l'horreur lorsque les portes s'ouvriraient sur le corps sans vie de sa délicieuse ennemie. Effaçant son sourire carnassier le jeune homme mua son air de prédateur en une expression d'inquiétude. Il ne savait d'où il tenait ce talent mais il était un excellent comédien, ce qui faisait de lui un manipulateur redoutable. Faisant mine de chercher la jeune femme désespérément, le jeune homme s'approcha du camp comme un humain effaré. Face au jeu impeccable du vampire, et de l'absence étrange de Chanel, les blocards commencèrent à s’inquiéter. Au paroxysme de sa prestation le jeune homme s'assit brusquement par terre, enfouissant son visage dans ses mains.

« C'est ma faute. » dit-il « J'aurais dû l'arrêter, elle voulait des réponses, elle semblait si déterminée... mais je l'ai ignorée. » Il massa ses tempes comme si ces dernières lui étaient douloureuses « J'aurais dû savoir qu'elle profiterait qu'on ait le dos tourné pour se jeter dans la gueule du loup... »

Rassemblés devant les portes, les blocards attendaient l'ouverture des portes comme si ces dernières s'étaient soudainement muées en sortie durant la nuit. Et lorsque l'imposante façade en béton se scinda en deux par une légère fente, les blocards muèrent leur impatience en une inquiétude certaine. C'était le moment de vérité. Tout accéléra d'un coup dès qu'ils aperçurent le corps de la jeune femme, un groupe de blocards se ruèrent sur elle. Elle paraissait vivante, mais dans un état effroyable. Certains secouèrent la tête, pour eux elle allait pas tenir de ses blessures à coup sûr. Soudain, dans toute cette confusion, Alessandro entendit un murmure, « Aless... » Mise en garde la jeune femme avant de sombrer. Il esquissa un demi-sourire, c'était une coriace. Mais sa mise en garde n'eut pas l'effet voulu car tous en chœur prirent ces mots pour un appel et Minho demanda à Alessandro de les rejoindre au chevet de la jeune femme. Inconsciente elle était pourtant vivante, ou du moins encore un peu vivante. Jouant le jeu jusqu'au bout le jeune homme s’agenouilla au chevet de la brunette « Ne t'inquiètes pas Chanel, les medjacks vont te remettre sur pieds. » Évidemment il espérait tout le contraire. Elle pouvait encore sombrer de ses blessure, elle pouvait encore faire de cette vengeance une réussite.

Les blocards gesticulaient dans tous les sens, paniqués et surpris. Ils ne s'attendaient pas à découvrir le corps inerte de la brune, gisant sur le sol. Newt affichait un air déboussolé tandis que Minho criait pour que les medjacks aillent plus vite. « Bougez vous les fesses, bande de tocards ! » La jeune femme luttait tant bien que mal pour garder les yeux ouverts, jusqu'à ce qu'un autre jeune homme vienne s'agenouiller à ses côtés. Alessandro... « Ne t'inquiètes pas Chanel, les medjacks vont te remettre sur pieds. » Elle aurait voulu crier à l'aide, hurler ou le frapper mais elle en était incapable. Au lieu de ça, elle sombra. Plusieurs jeunes hommes la portèrent jusqu'à la cabane la plus proche, où ils l'installèrent délicatement sur un matelas. Les medjacks avaient soigné ses blessures du mieux qu'ils pouvaient. Les blocards la surveillèrent à tour de rôle, afin de s'assurer de son état.

Chanel se réveilla quelques heures plus tard. Son corps tout entier la faisait souffrir, et elle dû faire un effort considérable pour se redresser. En observant les alentours, l'atmosphère était calme et un seul blocard était présent dans la pièce, tapis dans l'ombre. L'humaine était encore couverte de sang qui avait séché, et elle s'approcha d'un petit miroir afin d'admirer les dégâts. Chaque parcelle de sa peau était endommagée, et les plaies étaient nombreuses. Elle porta une main près de son cou en gémissant, où une marque de lame était visible. Il y avait également des empreintes de griffures qui s'étalaient le long de son dos endolori. On pouvait dire que la jeune femme était dans un état lamentable. Même ses vêtements ressemblaient à des haillons, notamment son tee-shirt qui était déchiré et laissait entrevoir une partie de son abdomen, ainsi que qu'une partie de son buste qui dévoilait un morceau de son sous-vêtement.

Aless s'avança vers elle lentement, tandis que Chanel remarqua qu'elle n'avait plus son collier. En relevant la tête, elle apercevait à travers le miroir la silhouette et le visage du vampire. Elle hurla et se retourna brusquement en courant vers la porte. Mais à peine eut-elle tourné la poignée que le vampire bloqua l'ouverture, en la retenant simplement avec une seule main. « Pitié, non... Aidez-moi ! Je vous en prie, aidez-moi. » Elle tambourinait sur la porte, en espérant qu'un blocard puisse l'entendre. Mais Alessandro l'attrapa en lui mettant brutalement une main sur la bouche afin de l'empêcher de crier.

Minho débarqua en demandant ce qu'il se passait. Évidemment Aless trouva les bons mots pour déballer une excuse valable. Il lui expliqua que Chanel s'était réveillée furieuse à cause du choc. « Où est Thomas ? Je veux voir Thomas ! » C'était le seul qui pouvait la croire. Deux autres jeunes hommes entrèrent dans la pièce et tentèrent de la calmer et de la résonner. Elle s'agitait dans tous les sens en se débattant. L'humaine pointait Aless du doigt, mais les blocards ne l'écoutèrent pas. « C'est lui. C'est lui qui a essayé de me tuer ! » Chanel s'approcha rapidement et frappa le vampire au visage. Ils durent se mettre à quatre afin de la retenir. « Qu'est-ce que tu racontes ? Calmes-toi, personne n'a essayé de te tuer. On veut juste t'aider. » Les garçons lui administrèrent quelque chose qui la calma rapidement et elle ne tarda pas à s'écrouler sur le sol, épuisée et à bout de forces. Ils la remirent sur le matelas et ils sortirent de la cabane.

Personne ne comprenait son comportement brutal et ils remercièrent à la place Alessandro qui les avait prévenu. Chanel se réveilla de nouveau quelques minutes plus tard, seule dans la pièce boisée. Ses souvenirs étaient flous. Elle se souvenait seulement avoir discuté tranquillement avec Aless la vieille au soir et puis plus rien. La moitié de ses blessures avait disparu. Sûrement lui avait-on donné du sang de vampire afin de la soigner.     

Tapi dans l'ombre, il attendait. L'obscurité était sa demeure, son refuge. Il avait toujours appartenu aux ténèbres, chacun de ses actes dictés par la noirceur qui l'habitait. La chaîne argentée fila entre ses doigts, de l'index il effaça une trace de sang du médaillon. Sans ce bijou autour du cou gracile de sa victime, plus rien ne pouvait compromettre ses plans. Elle lui avait peut-être échappée aujourd'hui, mais demain est un autre jour.

Les medjacks quittèrent la cabane en dernier, enfin la jeune femme était seule. Enfin était venu le moment de sortir de l'ombre, la bête tapie n'avait plus lieu de se cacher. Il était temps. Lorsqu'il entra dans la pièce, elle était déjà éveillée et en pleine possession de ses esprits. L'adrénaline et la peur la motivèrent à riposter aussitôt qu'elle l'aperçut. Chanel bondit vers la porte en hurlant, en vain, il ne fallut pas moins d'une fraction de seconde pour l'arrêter. Plaquant une main contre sa bouche, il étouffa les cris de la jeune femme, seulement il était trop tard. Quelqu'un avait déjà entendu ses hurlements.

Minho entra en trombe dans la pièce, alerté par les cris. Aussitôt le vampire desserra sa pression sur la bouche de la brunette. Il tourna la tête vers le blocard, sans lâcher Chanel pour autant. « Elle est encore sous le choc, ça va lui passer. » ironisa-t-il pour convaincre Minho qu'il n'y avait rien de plus grave qu'une petite crise de panique. Seulement ce que Minho ignorait c'est que la rage de Chanel ne venait pas du choc, mais d'Alessandro. Cependant Chanel ne comptait pas s'arrêter en si bon chemin, elle s'égosillait, hurlait. « C'est lui. C'est lui qui a essayé de me tuer ! » cria-t-elle au même moment où deux autres blocards entrèrent. Elle continua de jouer les hystériques, allant jusqu'à frapper le vampire au visage. Quatre personne semblèrent insuffisantes à la maîtriser, heureusement que les sédatifs étaient de leur côté.

L'aiguille plantée dans son cou, le liquide s'insinuant doucement dans son organisme, le corps de la jeune était sur le point de faillir. Avant qu'elle ne s'écroule au sol, Alessandro la rattrapa et, avec l'aide des autres blocards, ils la remirent sur son matelas. Les traits détendus, la jeune femme semblait si calme à présent qu'il aurait été impossible d'imaginer qu'elle avait été hystérique la minute d'avant. Assis au bord du lit, le jeune homme attendit que sa victime reprenne conscience.

Lorsque les yeux de la jeune femme s'ouvrirent à nouveau, anticipant une nouvelle hystérie, le vampire plaqua sa main contre la bouche de la jeune femme. Lui intimant de ne pas songer à hurler ou ne serait-ce que de bouger un cil. Plantant son regard dans le sien il dirigea tous ses efforts pour la contraindre. « Ce qu'il s'est passé devant les portes et après n'étaient pas ma faute, tu oublieras tout ce qui pourrait me remettre en cause. Hier soir, après notre discussion, tu es entrée dans le Labyrinthe par toi-même, je n'ai rien à voir avec ça, au contraire je suis pas ton ennemi Chanel, disons qu'à la place... Je suis ton sauveur. » récita-t-il en esquissant un sourire. Sa dernière phrase le fit rire intérieurement, et même si cela semblait impossible, elle obéirait. A présent Alessandro n'était plus un ennemi aux yeux de Chanel, mais un ami, un confident..un sauveur. Elle hocha la tête doucement tandis qu'il glissa son collier dans la main frêle de la jeune femme. Alessandro esquissa un sourire puis disparu de la pièce pendant que Chanel retombait dans l'inconscience.

Les heures s'écoulèrent, lorsque le soleil atteint son zénith les blocards se rendirent au réfectoire le temps d'un repas. Alessandro en profita pour se glisser à nouveau aux côtés de Chanel. Lorsqu'il pénétra dans la pièce, la jeune femme lui sauta dans les bras. « Merci. Tu m'as sauvée. » murmura-t-elle en reculant d'un pas. Rapprochant son visage du sien, la brune s'apprêtait à lui donner un baiser sur la joue, au lieu de cela leurs lèvres dérapèrent et se touchèrent.

Sous le choc, le jeune homme s'apprêtait à la repousser lorsqu'il réalisa l'avantage que la situation lui apportait. Dehors un groupe de blocard sortait du réfectoire, se dirigeant vers eux. Alors le vampire ne réfléchit plus à ce qui avait poussé la jeune femme à l'embrasser et il l'embrassa en retour. Ses mains se glissèrent sur la taille de la brune, d'une simple pression leurs hanches se rapprochèrent. Collés l'un contre l'autre, lèvres contre lèvres.

La porte s'ouvrit alors sur une surprise générale. Alessandro se détacha aussitôt de la jeune femme tandis que les blocards sourirent béatement, ils étaient partagés entre l'incompréhension et la simple surprise. « On dirait qu'ils se sont rabibochés ces deux-là ! » railla alors l'un d'eux.

D'une façon ou d'une autre il allait la trouver. D'une façon ou d'une autre il allait l'avoir. La seule chose plus forte que sa soif de sang c’était sa réelle vengeance envers cette fille. Il lui avait menti, de la même façon qu'il avait l'habitude de le faire, avec un sourire qu'il truquerait encore. Elle était à peu près certaine de trois choses. Un, Alessandro était un vampire. Deux, une part de lui désirait s’abreuver de son sang et trois, elle avait l'impression de lui être grandement redevable et reconnaissante.  « Je suis ton sauveur. » C'était tout ce qu'elle s'était souvenue lors de son réveil. Juste un charmant jeune homme qui l'avait sortie des griffes des monstres mécaniques.

Chanel avait bondit dans ses bras lorsqu'il était entré dans la pièce. En rapprochant son visage du sien afin de l'embrasser sur la joue en guise de remerciement, ses lèvres touchèrent délicatement les siennes sous la précipitation. Avant même de pouvoir riposter ou de dire quoique ce soit, Aless l'embrassa en retour. Ses mains se glissèrent ensuite sur la taille de la jeune femme, et d'une simple pression leurs corps se rapprochèrent l'un de l'autre. Sans comprendre pourquoi, son cœur battait à vive allure et sa respiration s'accélérait. Tout cela s'était passé si vite, et le contrôle de la situation leur avait échappé.

La porte de la petite cabane en bois s'ouvrit, et un groupe de blocards entra. Alessandro se détacha rapidement de l'humaine, alors que les jeunes hommes souriaient ou affichaient une expression de surprise et d'étonnement. Chanel recula à son tour d'un pas, avec un air confus, presque gêné. « On dirait qu'ils se sont rabibochés ces deux-là ! » Elle baissa la tête un court instant, n'osant pas croiser les prunelles du vampire. Qu'est-ce qu'il lui avait pris ? « Je... Je ferais mieux d'y aller. » La jolie brune se dirigea vers le groupe de personnes qui se tenaient juste devant la porte. Ils s'écartèrent lentement afin de lui dégager le passage. Les autres blocards venaient tout juste de terminer leur repas de midi. Certains retournèrent tranquillement à leurs occupations, tandis que les autres discutaient encore près du réfectoire.

Chanel sortant en trombe de la pièce, percuta un jeune homme. C'était sûr que certains allaient encore se poser des questions. « Tout va bien ? » Elle soupira et rejoignit le centre du Bloc. Les Coureurs repartirent parcourir le Labyrinthe et les Matons reprenaient leurs tâches habituelles. Le soleil brillait et l'atmosphère était plutôt calme et apaisante. En croisant Newt, il lui indiqua de rejoindre le groupe des Sarcleurs. Les Sarcleurs passaient la majeure partie de leur temps dans les jardins à arracher les mauvaises herbes, planter des graines, tailler des arbres ou bien cultiver des fruits et légumes. Comme toutes les autres arrivantes, elle allait aussi être assignée à une tâche dans le Bloc pour l'après-midi. Chacun avait un groupe attribué et devait faire sa part que ça lui plaise ou non. La jeune femme fût donc désignée afin d'aller aider les autres à cueillir des fruits dans les plantations. Le Maton des Sarcleurs lui expliqua brièvement les activités de son secteur, et le groupe ne tarda pas à suivre les ordres dans le plus grand calme.

La jeune femme commença à entreprendre sa corvée, quand à peine eût-elle le temps de ramasser quelques fraises et mûres qu'Aless s'approchait. Cela devait faire une heure ou deux qu'elle l'avait laissé en plan, et le revoilà déjà qui venait également dans le coin afin de tailler des arbres tout proches. L'humaine continuait sa récolte, en ne se souciant absolument pas de lui. Elle n'avait pas encore eût l'occasion de réfléchir aux récents événements de la matinée. Leur baiser avait-il signifié quelque chose pour lui ? Elle n'en avait aucune idée. Elle préféra se concentrer sur sa tâche, et prit le temps de remplir les paniers. Au bout du quatrième rempli, elle s'arrêta un instant et se posa contre le mince tronc d'un arbre. La chaleur se faisait ressentir et les blocards en profitèrent pour prendre une courte pause. La brune tourna alors son regard vers le vampire qui s’interrompit à son tour. Il s'avança vers Chanel, qui attendit alors qu'il prenne la parole en premier.

Ses cheveux bruns flottaient dans l'air, ondulant dans son dos au rythme de ses pas tandis qu'elle s'éloignait. Il la suivit des yeux tandis qu'elle partait encore plus loin de lui... et pourtant c'était elle qui l'avait approché en premier lieu. Voilà ce qu'Alessandro appréciait chez les humains, la complexité de leurs sentiments pouvait les pousser à des actes totalement contradictoires, comme embrasser son pire ennemi. Il tenta de s'expliquer que ce geste totalement fou et impulsif venait de la contrainte, mais jamais il ne l'avait contraint à ça, seulement à oublier qu'il avait voulu la tuer. Le reste venait d'elle, cela venait seulement d'elle. La suite en serait bien plus intéressante, et la tuer en serait que bien plus satisfaisant.

Lorsqu'elle eut disparu de son champ de vision, Alessandro du affronter le sourire en coin des autres blocards, s'ils étaient des hommes quand il s'agissait de commérages, ceux là étaient pires que des femmes. Le brun leva les yeux au ciel et força le passage entre eux pour sortir de la pièce. Il ne souhaitait pas être lancé sur le sujet comme si c'était un début de romance, car s'il devait commencer quelque chose avec Chanel...c'était par commencer à la faire souffrir, d'abord en la poignardant dans le dos, puis en la faisant souffrir physiquement, puis il pourra la tuer. Ainsi sa vengeance serait faite.

Une heure passa, ou peut être bien deux. Le temps filait sans qu'il n'en prête attention, mais bientôt la réalité le rattrapa. Et, comme tout bon blocard, il du participer à la vie du bloc, corvées comprises. Le brun s'y attela en râlant intérieurement, que fallait-il dans cet endroit pour être tranquille plus de deux minutes afin de préparer un plan aussi mortel que diabolique ? Alors qu'il s'affairait à tailler un arbre il aperçu la chevelure brune de la jeune femme qui baissa la tête pour éviter de croiser son regard. Il esquissa un sourire, comme si l'éviter serait la solution. Elle se méprenait totalement, il n'était pas là pour jouer les vampires amoureux, enfin pas pour de vrai, il voulait simplement la faire souffrir autant qu'il avait souffert.

Lorsqu'elle arrêta enfin de s'affairer aux corvées pour prendre une pause, Alessandro décida que c'était le moment d'endosser son rôle de pathétique vampire empli de bonté. Ce qu'il n'était pas. Il s'approcha alors d'elle tandis qu'elle le fixait, attendant qu'il parle en premier.

« J'allais commencé à croire que tu m'évites. » lança-t-il avec désinvolture tout en marchant vers elle. « Et avant que tu ne commences à jouer l'innocente victime dans cette histoire je tiens à rappeler que tu m'as embrassé en premier. »

Il esquissa un sourire moqueur devant lequel la jeune femme ouvrit la bouche pour riposter, mais il reprit alors la parole, l'empêchant de plaider sa cause. « Mais avant que tu ne t'emballes, autant que tu saches que ce qu'il s'est passé tout à l'heure ne se reproduira pas, jamais. Ce baiser ne signifiait rien pour moi, je suis ton ami, et je ne serais rien de plus... » Hormis celui qui tu tuera acheva-t-il mentalement.

La pause était annoncée. Les blocards se dirigèrent tous pour la plupart vers le centre du Bloc, pour discuter ou simplement se désaltérer. Quand Alessandro approcha avec sa démarche silencieuse et sereine. Il avait un air impassible plaqué sur le visage et très indifférent, comme insensible et imperturbable. Cette fois, elle ne pouvait plus l'éviter. La jeune femme se tourna alors lentement vers lui en plongeant ses prunelles dans les siennes. Peut-être était-ce le fruit de son imagination, mais on aurait cru qu'il y avait une sorte d'étincelle dans ses yeux. Certes, minime mais il y avait quelque chose. Sûrement se trompait-elle fortement. Il était téméraire et dangereux. Un être assoiffé de sang humain. C'était un vampire, un monstre, rien de plus.

Aless continuait de s'avancer vers elle, en arborant un léger sourire dessiné finement sur ses lèvres. « J'allais commencé à croire que tu m'évites. Et avant que tu ne commences à jouer l'innocente victime dans cette histoire je tiens à rappeler que tu m'as embrassé en premier. » Elle ouvrait à peine la bouche afin de lui répondre, qu'il répliqua instantanément. Il n'avait pas tort. C'était bien elle qui l'avait embrassé en premier et non l'inverse. La jeune humaine était encore indécise, et ne savait pas ce qui l'avait poussée à agir ainsi. Était-ce seulement de la compassion et de la gratitude ou bien était-ce plus que cela ? Elle était inquiète, mais le nom du vampire était une vague qui pouvait la délivrer. Il n'y avait pas de jeu, elle aurait été prête à se donner entièrement à lui. Parce qu'elle ne se souciait pas de ce que les blocards pouvaient dire de lui, mais elle savait ce qu'ils disaient de l'inquiétude.  

Son sourire s'effaça bien vite. Alessandro venait de toucher en plein dans le mille. « Mais avant que tu ne t'emballes, autant que tu saches que ce qu'il s'est passé tout à l'heure ne se reproduira pas, jamais. Ce baiser ne signifiait rien pour moi, je suis ton ami, et je ne serais rien de plus... » Ces paroles étaient blessantes et la touchèrent droit au cœur, comme si tout venait de s'effondrer. Elle se doutait qu'il n'était pas épris mais pas au point de lui briser le cœur de cette façon. La jeune femme ne pouvait pas lui reprocher d'être direct et sincère mais il aurait pu se montrer plus doux et indulgent. Il pouvait la détruire si il le voulait, mais de là à dire que leur baiser n'avait rien signifié ? C'en était presque cruel, vide d'émotion.

Chanel en resta bouche-bée. Il y avait quelques secondes à peine, elle aurait presque entendu dans son esprit un simple je te veux et maintenant tout s'écroulait. Naïve et stupide, elle s'était fait des illusions sur le monde, ainsi que sur lui. « Mais... Pourquoi m'as-tu embrassé en retour ? » Si il n'avait aucune affection pour elle comme il le prétendait, alors pourquoi lui avait-il rendu son baiser au lieu de la repousser gentiment ? Elle avait besoin de savoir, de comprendre son acte. La jolie brune était trop fleur bleue, c'était sûrement ça son erreur. La jeune femme observa alors la réaction du vampire, qui la regardait comme si elle n'était qu'une étrangère. Ça faisait mal. La réalité la rattrapa de plein fouet. Qu'il en soit ainsi.

Trahie, blessée, les émotions humaines étaient comme un miroir, si à l'intérieur ils ressentaient une once de sentiments, ces derniers se dévoilaient aussitôt sur leur visage. Amour, colère, un rien les faisaient chavirer, un geste, un mot, un regard, en une fraction de seconde leurs mondes pouvaient basculer. Il suffisait de si peu...et en un battement de cils une vague les submergeait. C'était comme des montagnes russes, des hauts et des bas, partagé entre ivresse et nausée. Voilà ce qu'est l'humanité..mais Alessandro n'était pas humain, il était plus que ça. Sa colère était lancinante, dévorante, elle le rongeait de l'intérieur, effaçant les dernières traces de tendresse dans cet être redoutable. Il n'était plus qu'un prédateur, un prédateur sous le masque d'un humain. C'était un monstre, le diable en personne, venu s'habiller de faiblesse. Ce n'est qu'un jeu d'acteur...le masque tombera bientôt, et ce moment sera sa mort se délecta-t-il de penser.

Il imaginait ses longs cheveux bruns dégageant son cou de porcelaine, sa peau fine et délicate, tendue sous la peur, les larmes coulant sur ses joues tandis qu'elle suppliait. Il se vit inhaler longuement l'odeur de son sang, il s'entendit écouter les battements affolés du pauvre petit coeur humain effrayé, il se sentit attraper sa victime avec tant de violence que ses os se cassèrent. Il s'imagina alors entrer ses crocs dans sa chaire, déchirant son aorte, pompant son sang comme une sangsue, puis voir le corps sans vie s'étaler sur le sol comme un sac vide, comme....

« Mais... Pourquoi m'as-tu embrassé en retour ? », sa voix sonnait comme un écho, l'image cadavérique sur le sol disparut et le visage bien vivant de la jeune femme s'imposa devant ses yeux. Elle semblait blessée, comme si ce baiser aurait vraiment signifié quelque chose pour elle. Alessandro se retint de sourire, peut être qu'il pourrait s'en amuser un peu avant de la tuer, peut être serait-elle plus qu'une vengeance, peut être la trahir quand il aurait son coeur serait encore plus excitant que la tuer quand il aurait sa confiance.

Mais avant de faire tomber les masques, il fallait entrer sur scène. Il passa sa langue sur ses dents, comme si le goût de son sang n'était pas qu'un mirage mais un souvenir qui s'y serait ancré. « Pourquoi m'as-tu embrassée en première ?  » déclara-t-il avec sous-entendu. Un sourire vint étirer ses lèvres, d'abord timide, puis plus franc. « Épargnons à nos fiertés d'être bafouillées dans de tels étalages, pourquoi ne pas garder une part de mystère. » commença-t-il d'un ton irrésistible qui s'acheva sur un ton plus espiègle « C'est tellement plus excitant »

Les blocards jetèrent un rapide coup d’œil dans leur direction. Il était évident que certaines oreilles indiscrètes devaient traîner autour. Les vampires et les loups avaient une ouïe beaucoup plus développée, leur permettant de suivre une conversation à plusieurs mètres de distance. C'était super pensa-t-elle, certains allaient être au courant de leur bref flirt si on pouvait appeler cela comme ça. Elle avait fait fort, en plus d'être le centre d'attention principal sans le vouloir, la voilà qui était le sujet numéro un des rumeurs. Un groupe de jeunes hommes s'approcha, tandis qu'ils se remirent à leurs tâches respectives. La petite pause semblait terminée.

Au bout de quelques minutes, les blocards étaient tous revenu à leur poste continuant leur mission au Bloc. Chanel et Alessandro étaient les seuls qui n'avaient pas repris leur tâche. Mais leur conversation était loin d'être achevée. Désormais, Chanel se fichait bien de ce que les autres pouvaient penser ou s'imaginer. De toute façon un groupe avait déjà eu une preuve lors de leur entrée quelques instants plus tôt dans la cabane. Inutile de nier, ils avaient bien vu leur baiser. La seule chose qui l’agaçait, c'était que Thomas puisse le découvrir. Pourquoi lui en particulier ? Elle n'en avait aucune idée. C'était trop tard pour la jouer discret, à la fin de la journée tout le monde allait sûrement l'apprendre et cela allait lui éclater en pleine figure lors du repas.

Chanel soupira en posant ses mains sur ses hanches. Elle passa nerveusement une main dans sa chevelure et haussa le ton instinctivement. « Bravo Alessandro. Tu es le premier à avoir réussi à attraper une fille. Tu dois être fier non ? » La brune afficha un sourire forcé en regardant les autres aux alentours qui n'osaient pas s'interposer et se mêler à leur conversation. Aless avait spontanément augmenter sa popularité au sein du Bloc. Lui qui était selon les autres discret et pas très sociable, maintenant il avait également attiré la curiosité de ses compagnons.

Le jeune homme étira un grand sourire et répliqua à son tour en utilisant un ton moqueur et taquin comme si c'était un jeu. « Pourquoi m'as-tu embrassée en première ? » Il était malin, le vampire avait marqué un point. Mais cela dit, il n'avait pas répondu à sa question. « Épargnons à nos fiertés d'être bafouillés dans de tels étalages, pourquoi ne pas garder une part de mystère. C'est tellement plus excitant. » Il la narguait sans aucune gêne, tel un homme qui accordait trop d'importance à son ego. Ça ne la faisait pas rire du tout. Elle lui donna une tape sur l'épaule en ripostant. « Ce n'est pas un jeu Aless ! On est quoi au juste ? » Un couple qui se consumait ? Non certainement pas. Ils n'étaient rien, rien du tout. Le vampire s'amusait à jouer avec ses sentiments, mais comme il l'avait dit précédemment cela n'était que baliverne. Ce baiser ne signifiait rien pour moi... La jeune femme entendait encore ces paroles blessantes dans son esprit.

Quelques regards se tournèrent vers eux, tels des sangsues affamée de sang, les blocards étaient avides de rumeurs en tout genre. Les commérages aussi vrais qu'imaginaires étaient une véritable source d'amusement. Pour chasser l'ennui il n'y avait que deux choses à faire au Bloc, travailler ou commérer. Les deux étaient facilement cumulables, si bien qu'aucun secret confié à son voisin ne pouvait être dissimulé bien longtemps.

« Bravo Alessandro. Tu es le premier à avoir réussi à attraper une fille. Tu dois être fier non ? » déclara la jeune femme en haussant le ton, à ces dires les derniers regards encore tournés vers leurs travaux se levèrent enfin vers la petite scène de ménage qui se déroulait sous leur nez. « Chanel écoutes... » commença-t-il d'une voix douce, mais la jeune femme n'en avait pas fini avec lui. « Ce n'est pas un jeu Aless ! On est quoi au juste ? » demanda alors la brune, laissant l'acteur au dépourvu. Que répondre à ça ? La convaincre d'un autre mensonge en disant qu'il éprouvait quelque chose pour elle ? Il s'était enfoncé trop profondément dans sa première traîtrise pour remonter aussi facilement à la surface, il devait trouver le moyen de ne pas la blesser sans se compromettre lui-même, lui et sa mission.

« Écoutes je... je ne sais plus qui je suis, ou qui j'étais avant. J'ignore si j'ai une famille, des amis, ou même une femme qui m'attend hors de ses murs priant pour mon retour. » Il baissa les yeux au sol, comme si son esprit maléfique était lui-même hanté par un autre démon. « Et peut-être qu'il n'y a personne pour moi dehors mais durant ces deux dernières années, je me suis détachée petit à petit de toutes ces pensées. La fraternité, l'amitié, l'amour, j'ai oublié tout ça, je n'ai gardé que la colère et la frustration et, tu n'as pas besoin de ça. »

Il s'approcha d'elle, posant une main sur sa joue, caressant sa peau d'ivoire. Il déposa un baiser sur son front et la regardant droit dans les yeux il déclara d'une petite voix « Je ne sais pas ce que l'on est Chanel, mais on trouvera. »

Tel le feu sous la glace, une disparité inévitable. Debout, à deux doigts de sauter dans l'ignorance, encore et encore, elle ne comprendrait jamais le jeune homme. Elle devrait couper les liens, les laisser brûler et fuir loin de lui. Mais d'une façon incertaine, les opposés s'attiraient constamment. Ce chasseur, elle l'avait laissé capturer son cœur, et il n’y avait rien qu'elle pouvait faire. Dans la lumière du jour à la vue de tous, ces deux personnes se tenaient loin des autres mais proches l'une de l'autre. Quand le monde nous accablait de lourds tourments, notre entourage semblait inexistant. Pourtant elle ne s'enfuyait pas même si elle avait peur, et ne lui tournerait pas le dos. Elle tenait bon pour se relever, jusqu'à y croire définitivement. Ses larmes pouvaient tomber comme une pluie de diamant mais rien ne sera plus pareil. La jeune femme pouvait être agitée, être sauvage, déchirée de l'intérieur. Elle pouvait être froide, mais elle brûlait d'envie pour un nouveau départ. La brune ne pourrait pas l'ignorer même si elle le souhaitait, car quelque chose continuait de l'attirer vers lui depuis la toute première fois où leurs regards s'étaient croisés, donnant une énergie si puissante et dynamique. Une mixture qui était loin d'être sensible et délicate.

Le vampire commençait déjà à répliquer mais elle ne lui laissa pas le temps de prononcer sa phrase entièrement, l'obligeant alors à l'écouter. Elle avait besoin qu'il sache qui elle était, qu'il s'ouvre à elle en dévoilant alors sa personnalité. La vérité, c'est qu'elle avait peur de devenir comme lui, un vampire. Quand la jeune femme eut fini de parler, il prit alors la parole à son tour. « Écoutes je... je ne sais plus qui je suis, ou qui j'étais avant. J'ignore si j'ai une famille, des amis, ou même une femme qui m'attend hors de ses murs priant pour mon retour. » Il continua avec entrain. « Et peut-être qu'il n'y a personne pour moi dehors mais durant ces deux dernières années, je me suis détaché petit à petit de toutes ces pensées. La fraternité, l'amitié, l'amour, j'ai oublié tout ça, je n'ai gardé que la colère et la frustration et, tu n'as pas besoin de ça. » Il avait raison, elle n'avait plus besoin de personne désormais. Personne sur qui compter, personne à qui donner sa confiance mis à part Thomas. Et encore... Elle commençait à douter. C'était trop de choses à assimiler d'un coup. Tout était sur le point d'être remis en question une nouvelle fois.  

Il s'approcha alors vers elle, posant ensuite une main sur sa joue. Elle ressentait ses lèvres brûlantes sur son front. « Je ne sais pas ce que l'on est Chanel, mais on trouvera. » Cette phrase produisait soudainement comme un déclic. La jeune humaine plongea ses prunelles dans celles d'Aless et eut comme un mouvement de recul. Il allait devoir faire plus que cela si il voulait se rattraper. « Nous ne sommes rien du tout. » Voici sa conclusion. La brune finit par se détacher de lui, et posa sa main sur la sienne qui était toujours disposée sur son visage afin de le repousser. La discussion était close, point à la ligne. Il était temps de revenir dans les plantations parmi les autres blocards pour se concentrer sur leurs tâches respectives.